Dernière édition le 13 juin 2005
Prologue :
La panique régnait sur la Banquise de Lyoko. Odd et Ulrich étaient encerclés par une vingtaine de Blocks. Le 1er arrivait très difficilement à esquiver, malgré son agilité surdéveloppée, tous les tirs qui lui étaient destinés. Le 2ème commençait à fatiguer à force de devoir parer tous les coups sans jamais pouvoir s'approcher assez prêt des monstres pour leur porter un coup mortel.
Un peu plus loin, Yumi avait également du mal à accomplir sa mission : d’escorter Aelita. Elles subissaient toutes les deux les assauts répétés d'une petite escadrille de Frôlions. Profitant que les bestioles volantes venait de tirer un énième salve, elle projeta son éventail dans leur dos et réussit à en détruire 3, mais les 6 survivants revinrent immédiatement à la charge.
- Jérémy ! Ca va mal ! La Tour est encore loin ? cria Yumi
- Je l'ai dans le champ de vision ! Elle est à 600 mètres derrière vous ! Yumi, il faut que tu arrête dévier les lasers et foncer à la Tour ! Les choses se gâtent sur Terre ! lui répondit Jérémy.
La geisha ne chercha pas à réfléchir et entraîna Aelita par la main. Elles coururent le long du chemin qui menait à la Tour, en jetant parfois leur regard derrière elles afin d'anticiper les rafales des Frôlions. Après avoir éliminé encore trois autres Blocks, Odd fut une nouvelle fois touché à la poitrine et projeté en arrière.
- Odd ! Plus que 10 points de vie ! annonça Jérémy
- Retraite !! décida soudain Ulrich
Ulrich se retourna en courant et vint récupérer Odd au passage. Une quinzaine de Blocks venait de d'apparaître de nulle part derrière ceux que les deux guerriers n'avaient pas réussis à éliminer. A deux contre au moins quarante, le jeune samouraï conclut vite qu'ils n'avaient pas l’ombre d’une chance.
- Ben alors vieux, t'abandonne déjà ? commenta Odd en courant
- Je t'assure que j'aime bien découper des Blocks d'habitude, mais pas au point de risquer ma peau pour ça ! répondit Ulrich
Dans un moment de distraction, Odd fut touché dans le dos et s'écroula en avant. Ulrich se penchant vers lui mais il vit que son corps était en train de disparaître.
- Désolé vieux, mais pour moi, c'est Game Over !
Ulrich regarda son ami se faire complètement dévirtualisé. Il resta interdit pendant un moment mais Jérémy le rappela à l'ordre.
- Ulrich, je te rappelle qu'y a un régiment de Blocks qui te poursuit !!
- Il vaut mieux que t'ailles rejoindre Yumi, vieux ! intervint Odd qui remonté de la salle des scanners.
Le samouraï hocha la tête et dévia encore 3 tirs de lasers à l'aide de son sabre avant d’accélérer sa course en direction des filles. Yumi avait réussi à exploser tout les Frôlions qui les poursuivaient, elle et Aelita, sauf un. Elle para une nouvelle rafale de l'insecte volant, mais fut projetée en arrière sous le choc. Le Frôlion fit rapidement demi-tour et chargea sa victime, quand il s'écrasa soudainement contre un pilonne de pierre rapidement sorti du sol. Yumi se releva en se retournant vers Aelita et constata qu'elle était à genoux, les yeux fermés.
- C'était juste à temps Aelita ! fit Yumi, soulagée.
- Heureuse de rendre service !
- Yumi, attention !!
Un autre Frôlion surgit de dessous la plate-forme ; malheureusement, Yumi n'eut que le temps de se retourner pour voir un tir de laser s'abattre sur elle, la dévirtualisant sur le coup. Son scanner s'ouvrit, elle y était allongée, frappant du poing le sol.
- Aelita ! Cours !! hurla Jérémy
La fille virtuelle se releva rapidement et courra vers la Tour sans regarder derrière elle. Mais le Frôlion maintenait sans problème Aelita en joue, même de loin. Son destin paraissait scellé.
Soudain, elle s'arrêta net, entendant un sifflement aigu derrière elle accompagné d'un grésillement. Elle resta sur place quelques instants, n'osant pas se retourner. Elle vit pour finir le Frôlion qui la poursuivait, endommagé au sol, un sabre en travers du corps. Il n'explosa quelques instants plus tard. Le souffle de l'explosion projeta le sabre en l'air qui atterrit directement dans la main d'Ulrich tendue vers le ciel.
- Du grand art Ulrich ! commenta Jérémy.
- Merci, mais je crois qu'on a une Tour à aller désactiver, n'est-ce pas Aelita ? dit le jeune homme d'un ton très confiant
Elle hocha la tête en souriant. Ulrich se positionna devant elle et ils partirent vers La Tour pendant que Jérémy entrait les coordonnées de retour dans le temps (jour, heure). Une fois arrivés sur place, Aelita s’engouffra à l'intérieur. Au centre de la plate forme inférieur, elle s'éleva vers le second niveau tel un ange montant vers au Paradis. Pendant ce temps, Odd était redescendu aux scanners pour aider Yumi qui avait visiblement des difficultés à se remettre debout.
- Ulrich mauvaise nouvelle ! intervint Jérémy. Un Méga Tank vient droit sur toi !
Il dégaina son épée, juste à temps pour voir la boule métallique lui faire face. Il se mit en garde, mais son ennemi ne semblait pas vouloir avancer. La sphère menaçante s'ouvrit en deux et décocha son rayon mortel à une vitesse hallucinante, laissant juste à Ulrich une seconde de réflexe pour esquiver. Le rayon vint frapper la Tour de plein fouet.
Aelita venait à l'instant de poser sa main sur l'écran virtuel qu'elle avait ouvert, lorsqu'elle sentit une violente secousse. Elle tomba alors brutalement au sol. En se relevant, elle constata que le code avait bien été entré, mais une multitude de messages d'erreur se mirent à apparaître. De plus, d'après la trace laissée sur l'écran, Aelita était tombée en traînant sa main dessus. Pourtant, le processus de retour dans le temps semblait se dérouler comme prévu, jusqu'à moment :
- Retour vers le pass...
Au moment d'appuyer sur la touche ENTREE, Jérémy sentit le temps se brouiller autour de lui. Il eut l'impression de recevoir un coup de masse de 100 tonnes en plein sur le crâne. Il fut projeté au ralenti à 2 mètres derrière, le faisant perdre connaissance. Odd et Yumi étaient toujours à l'étage inférieur, ce qui fait que personne ne vit cette courte scène avant que la bulle temporelle ne s'étende sur le monde.
Etape I : Colère
Il était près de 16 heures, les garçons étaient en classe de physique. Jérémy, qui se trouvait au deuxième rang, était concentré comme à son habitude à 100 % sur le cours. Odd et Ulrich, à quelques tables derrière, discutaient ensemble en écoutant d'une oreille distraite le cours de Mme Hertz.
- Dis donc, tu trouves pas que XANA nous a vraiment donné du fil à retordre cette fois ? commença Ulrich
- Ouais, je commence à me demander ce qu'on a pu lui faire pour qu'il s'acharne sur nous comme ça !
- Nan, sérieux ! Ca m'a parut beaucoup plus dur que les dernières fois...
ils s’arrêtèrent immédiatement de parler quand ils virent les yeux de leur professeur se tourner dans leur direction. Odd avait même cru bon de siffler d'un air innocent. Elle finit tout de même par se retourner vers le tableau.
- Je disais, tu trouves pas que c'est de plus en plus dur... ? reprit le garçon brun
- Hé vieux, tu vas pas nous refaire une scène du genre "est-ce que ça va s'arrêter un jour, j'en ai marre de me battre" quand même ? lui rappela Odd
- C'est pas ce que je voulais dire, mais...
- Ulrich ! Puisque vous avez l'air de vouloir vous exprimer, voudriez-vous nous donner la solution du problème ? intervint Mme Hertz.
Le jeune homme releva la tête pour regarder le tableau. Rien que de voir tout ces chiffres lui donner mal à la tête et il n'avait rien suivi du cours depuis au moins 20 minutes. La professeur aux cheveux grisonnants commençait à s'impatienter quand par miracle, la sonnerie de la récréation retentit.
"Ouf, sauvé par le gong !" se dit Ulrich.
Jérémy n'avait pas dit un mot de toute l'heure. Il rangea rapidement ses affaires et fut même pour une fois, le premier à sortir de la classe. Odd et Ulrich se levèrent ensemble et sortirent dans la cours. Ils se dirigèrent vers leur arbre habituel, où Yumi les attendait déjà . Ils discutèrent de l'attaque qu'ils avaient contré avec difficulté, échangeant leurs impressions, leurs doutes, leurs exploits. Cela faisait dix bonnes minutes qu'ils parlaient de choses et d'autres, et ils ne virent toujours aucun signe de Jérémy.
- Dites, vous savez où il est passé notre petit génie ? demanda Yumi
- Maintenant que tu le dis... commenta Ulrich
- Dix contre un qu'il est parti faire un coucou à Aelita ! ^^ répondit Odd
Il continuèrent à discuter jusqu'à ce que Odd fit signe à Yumi de se retourner. Le blondinet lui parla de manière à ce qu'on puisse l'entendre de loin.
- Devines ce qui est rose, chiant, qui sort toujours accompagné, et qui va encore venir nous casser les pieds dans 5 secondes ?
- Attends... Sissi ? fit elle en souriant
En effet, elle était en vue, accompagnée de Nicolas et Hervé, comme à son habitude. Elle adressa un regard mauvais à Odd et Yumi puis se tourna vers Ulrich en l'inodant, comme si de rien n'était.
- Salut Ulrich ! Dis-moi, y a un nouveau film super romantique qui sort demain au cinoche, j'y ai déjà réservé deux billets. Comme j'ai pas vraiment l'intention d'y aller toute seule, je me demandais ça te dirais de m'accompagner ? dit-elle en approchant indiscrètement sa main de celle du jeune homme.
- Pourquoi tu demandes pas à un de tes laquais de faire cette corvée à la place d'Ulrich ?
Le petit attroupement se retourna soudainement. Ils aperçurent Jérémy qui attendait, les bras croisés. Son ton de voix était beaucoup plus dur qu'à l'accoutumée. Son regard était extrêmement mauvais. Hervé voulu prendre la défense de son "amie".
- Hé c'est pas à toi que Sissi parlait je te sig...
- Alors Miss Paillette, interrompit Jérémy sans prêter attention à Hervé. T'es à ce point débile que tu laisses tes toutous répondre à ta place ?
Ce dernier serra son poing à en trembler et avança d'un pas vers le blond à lunettes. Sissi l'empêcha d'aller plus loin en retenant son bras, voulant apparemment régler l'affaire toute seule.
- C'est pas un gamin qui va traiter Hervé comme ça ! Alors écoute Super tronche ! Tu...
- T'as tout faux ma vieille ! C'est toi qui va m'écouter, hurla presque Jérémy.
Il avait bien l'air de vouloir dire ses 4 vérités à la fille du proviseur. Il était méprisant dans ses propos, mais ne semblait pas en colère pour autant. Il continua.
- Ulrich ne veut pas de toi, il ne t'aime pas ! Moi non plus je ne t'aime pas... d'ailleurs personne ne t'aime !
Il regarda tour à tour Hervé et Nicolas.
"Ils ne le diront jamais, mais je suis sûr que ces deux là ne font que rester avec toi parce que tu leur fait pitié ! Je me demande même si tu en MERITES, de la pitié !"
La jeune fille en rose en était paralysée par une telle agression verbale. Jamais quelqu'un ne lui avait parlé sur un tel ton, même pas son propre père quand il eut été vraiment énervé. Il fit une pause, comme pour marquer ce qu'il allait dire. Personne, pas même ses amis n'osèrent l'interrompre.
- Tu n'aimes personne et personne ne t'aimes ! Alors lâches nous, et ne vient plus JAMAIS nous ennuyer, JAMAIS !! DISPARAIS !!
Nicolas et Hervé lui barraient la route, il passa entre les deux en les poussant sur le côté, ainsi que devant ses amis. Il s'éloigna ensuite en direction d'un banc un peu plus loin.
On aurait pu entendre une mouche voler. Sissi était médusée par la crise de colère que Jérémy venait de faire. Mais les autres n'en étaient pas moins étonnés. Même face à XANA, il ne l'avait jamais vu dans un tel état. Ils se dirigèrent vers le banc de Jérémy, en lassant Sissi et sa bande sur place.
- Ben ça alors ! s'écria Ulrich. Je croyais être le champion toutes catégories en "remballage de Sissi" mais là , Jérémy vient de me prendre mon titre en un seul essai !
- Ulrich ! Quand même ! Tu crois pas qu'il y est allé un peu fort ? demanda Yumi
- C'est vrai, ça lui ressemble pas tellement d'être aussi brutal... mais franchement, si ça nous permet d'avoir enfin à la paix, j'ai rien contre !
Jérémy était courbé sur le banc, assis avec la tête entre les mains. Il donnait l'impression d'être mal à l'aise. Odd lui parla en 1er avec enthousiasme.
- Hé Einstein, chapeau pour avoir remis Sissi à sa place ! Maintenant elle nous embêtera plus avant longtemps !
Jérémy ne répondit pas Il ne cessait de secouer la tête sur les côtés de manière régulière. Ses pensées étaient complètement en désordre, un vrai chaos. Le meilleur moyen qu'il avait pour ne pas se sentir plus mal était de ne pas réfléchir du tout, même si ce genre de situation l'énervait. Il répondit avec un ton beaucoup plus calme, presque triste.
- Les amis... désolé de vous demander ça mais, vous pourriez me laisser ? J'ai besoin d'être un peu seul !
- Laisse moi deviner, insista Odd, tu t'es disputé avec ta princesse ?
- Je... j'ai pas envie d'expliquer. S'il vous plaît, faites-le, c'est tout !
Yumi prit les deux garçons par leur main et les entraîna à quelques mètres de là .
- Dites, vous le trouvez pas bizarre ?!
- Oui un peu... faut dire qu'on s'est fait attaquer plein de fois de suite cette semaine, Jérémy' a aussi le droit de décompresser ! répondit Ulrich.
- En plus s'il s'est vraiment disputé avec Aelita, il a des raisons de vouloir être seul !
- C'est pas ce que je voulais dire : Et si XANA avait...
- Tu t'avances là , Yumi ! interrompit Ulrich. On va pas accuser XANA chaque fois qu'on a un coup déprime...
Pendant que ses amis ne le regardait pas, Jérémy se leva et se dirigea vers la prochaine salle de classe de la journée, la récréation était bientôt finie. De son côté, Sissi demanda à ses deux acolytes de la laisser, elle fondit en larmes...
Etape II : Le rêve qui fit tout basculé
Vers 21 heures, dans les dortoirs.
Jérémy n'avait parlé à personne de l'après midi, ni à ses amis, ni en cours pour répondre à des questions qui étaient pourtant si simples pour lui. Mais Odd insistait. Il était déjà allé plusieurs fois frapper à la porte de sa chambre, mais chaque fois, personne ne vint pas lui ouvrir. Cette insistance commençait à agacer Jérémy. Assis sur son lit, il prit son portable en main et le coupa.
Pourquoi agissait il d'une telle cette façon ? Pourquoi ne voulait-il pas évoquer ses problèmes ? La réponse était simple : lui-même ne savait pas ce qui lui prenait. Il se sentait bien à l'extérieur, mais quelque chose d'indéfinissable le dérangeait en lui. Exactement comme ces sensations que l'on a lorsque l'on se sent malade alors qu'on ne l'est pas.
"Peut être qu'en en parlant à Aelita ça ira mieux..." pensa-t-il.
Il se leva de son lit sans grande conviction et s'assit sur le siège devant son ordinateur. Il enfila son casque audio et se mit à pianota sur quelques touches de son clavier. Une fenêtre s'ouvrit sur son écran affichant "connexion en cours”, la Webcam n'était pas encore branchée. En attendant, il prit un mouchoir à côté de lui et enleva ses lunettes pour en nettoyer les verres. Lorsqu'il voulut souffler dessus, une chose le frappa : Il regarda sa tête dans les verres, il avait le teint aussi blafard qu'un cadavre et des cernes sous les yeux qui ressemblaient à des valises. Il refusait de croire qu'il pouvait être malade, cela arrivait si rarement. Pourtant tout concordait : ses amis inquiets, son manque de conversation, ses réactions agressives... Lui-même commençait à trouver qu'il était allé loin avec Sissi. Il fut ramené à la réalité par une voix familière.
- Jérémy, tu es là ? Je ne te vois pas !
L'image du visage d'Aelita s'afficha à l'écran. Le jeune garçon se miroita à nouveau dans ses lunettes.
- Jérémy, c'est moi ! Tu es là ? répéta elle en haussant le ton
Il s'osa pas dire un mot et ne fit même pas un geste, comme si son corps fut soudain paralysé. Non, il refusait qu'Aelita le voie dans un tel état. Il enleva doucement son casque audio d'une main tremblante et ferma la connexion avec Lyoko, le visage de la fille virtuelle s'effaça de l'écran. Il coupa ensuite l'alimentation de son ordinateur. Il croisa lentement ses bras sur son bureau devant le clavier et y posa sa tête. Même dans les moments de déprime, jamais encore il n'avait hésité à parler avec la personne qu'il chérissait le plus au monde. Pourtant, il n'éprouvait aucun regret, aucune tristesse... juste cette sensation de malaise indéfinissable.
Il n'avait plus le goût de rester debout. Il alla ouvrir la porte de son placard et enfila rapidement son pyjama, puis il s’allongea sur son lit. Il contempla pendant de longues minutes, dans l'obscurité de sa chambre, l'écran noir de son ordinateur, d'ordinaire toujours allumé. Il espérait qu'en prenant une nuit de sommeil normale, il pourrait trouver un remède à cet étrange malaise qui inquiétait son entourage plus que lui. En effet, depuis plus de deux mois, il travaillait tous les soirs avec le même acharnement sur l'anti-virus d'Aelita. Il se tourna sur le côté, après avoir déposé ses lunettes sur la table de chevet. Il s’endormit au bout d'une demi-heure.
Il rouvrit les yeux. De sa vue troublée sans lunettes, il put distinguer de gros nuages noirs qui s'amoncelaient au-dessus de sa tête. Il crut d'abord à une illusion due à la fatigue, jusqu'à ce qu'il se relève brusquement quand retentit un grondement de tonnerre. Il regarda autour de lui : il était en pyjama, pieds nus. Vêtu exactement de la même façon qu'il était allé se coucher... sur le pont de l'usine en pleine nuit.
Une seule explication rationnelle lui vint à l'esprit : un rêve, ou plutôt un cauchemar. Mais il avait beau se secouer la tête, impossible de se réveiller. Il resta sur place un moment sans bouger. Il se demandait quoi faire. Tout à coup derrière lui, une lumière fugace vint éclairer l'intérieur de la salle cathédrale, comme une invitation à y entrer. N'ayant pas vraiment la volonté ni l'envie de réfléchir, il se dirigea à l'intérieur d'un pas nonchalant, car c'était tout ce qu'il pouvait faire.
L'air était pesant. Des bruits faibles mais grinçants et réguliers faisaient écho dans le silence de la grande salle, rendant l'endroit plus lugubre qu'un cimetière. Le jeune garçon fit le tour de la cathédrale de verre pendant un moment, la parcourant de ses yeux troubles. Il sentit soudain derrière lui un contact froid, il fit volte-face...
Un fantôme, un spectre ressemblant trait pour trait à Odd se dressait devant Jérémy. Sa voix semblait provenir des entrailles de la Terre.
- Salut Einstein ! Comment ça va aujourd'hui ?
Il avait aussi le même ton enjoué que le blondinet aux cheveux dressés. Jérémy était encore troublé, mais il voulut entamer un dialogue.
- Odd !... C'est... c'est toi ?
- Non, pas vraiment ! Je suis qu'une image dans ton esprit, l'image que tu te fais de moi !
- Je suis... dans mon esprit ? Mais je rêve !!
- Ouais, tu rêves Jérémy ! Mais c'est pas encore l'heure de te réveiller !
Il pointa son doigt vers le volet roulant du monte-charge conduisant aux sous-sols, il se leva alors comme par magie. Alerté par le bruit Jérémy se détourna du spectre.
- Ton esprit à quelques petites choses à te montrer ! A plus tard Einstein !
Le temps pour Jérémy de se retourner vers son interlocuteur, celui-ci s'était évaporé. Il se dirigea vers l'ascenseur, sa curiosité s'en trouvant fortement éprouvée. Quand il fut à l'intérieur, le volet roulant se referma et le gros engin entama sa descente. Elle était beaucoup plus lente que d'habitude, comme si le monte-charge allait offrir à Jérémy un allé simple pour l'Enfer. Mais avec ce qu'il allait vivre, l'Enfer n'aurait pas pu être pire...
Le sas blindé de l'énorme appareil s'ouvrit en deux dans un grand nuage de fumée blanche sur la salle des scanners. Jérémy s'avança au milieu de la pièce, pied nus sur le sol métallique froid. Soudain, 2 des trois sarcophages dorés se mirent à ronronner pendant un court instant avant que les portes ne s'ouvrent en même temps dans un flash de lumière aveuglante. C'était presque prévisible. Après que l'intense lumière fut dissipée, Jérémy vit apparaître en face de lui deux autres formes aux allures humaines, tout comme l'était le spectre de Odd. Sauf qu'il s'agissait cette fois d'Ulrich et Yumi. Voyant que les deux ectoplasmes se rapprochaient de lui en flottant au-dessus du sol, Jérémy fit quelques pas en arrière et trébucha sur un gros câble.
- Du calme Jérémy, on ne te veut pas de mal ! commença "Ulrich"
- On veut juste te parler ! continua "Yumi"
- Vous.. vous n'êtes même pas réels ! Pourquoi je devrais vous écouter ? dit il, tremblant
- Odd a du te le dire, ton esprit veut de montrer quelque chose... une image douloureuse. Pas que tu aies déjà vécue... mais qui pourrait arriver un jour ou l'autre... reprit "Ulrich"
- ... si tu continue à combattre XANA comme tu le fais !
Jérémy se releva, il resta interdit face à ce que venait de dire "Yumi".
- Je croyais que mon esprit ne pouvait pas inventer des choses qui ne se sont pas encore passées ? Vous vous contredisez entre fantômes ! dit-il en essayant de créer un effet de style
- Ton esprit ne peut pas prévoir des événements futurs, reprit "Ulrich", mais il est parfaitement capable de les imaginer...
Des doutes commencèrent à envahir les pensées du petit génie sans lunettes. La manière dont ces fantômes parlaient de ce qu'il allait voir n'était pas réjouissante du tout.
- Alors, qu'est-ce que je dois faire ?
- Descends jusqu'au Supercalculateur ! Il y a quelqu'un qui t'y attend !
Les deux spectres se dégradèrent lentement puis finirent par s'évaporer dans l'air, air qui se faisait de plus en plus lourd autour de Jérémy, devenant à peine supportable. Il avait beau faire tous les efforts du monde, il n'arrivait toujours pas à se réveiller. Ses doutes étaient tels qu'il commençait à croire que tout cela n'était un ni rêve, ni un cauchemar, mais bien une réalité que quelqu'un aurait altérée. Il se résigna à remonter dans l'ascenseur, qui se mit à descendre tout seul dès qu'il fut à l'intérieur. Les portes en titane s’ouvrirent à nouveau, cette fois, sur une pièce complètement noire. Une curiosité sans borne poussa malgré tout Jérémy à avancer. Il fut pris de court quand le sas se ferma en moins de temps qu'il lui en ait jamais fallu pour s'ouvrir. Jérémy se précipita vers lui, mais il était trop tard. Il entendit déjà le monte-charge reprendre son ascension. La salle s'illumina alors que Jérémy se retourna.
Au milieu de la pièce, à la place de l'imposante structure noire où se logeait XANA, se tenait une grande forme humaine (semblait-il) d'environ deux mètres dix. Elle était recouverte d'une grande et large aube noire surmontée d'une capuche qui pourtant ne pouvait cacher son visage, s'il en avait eu un...
Jérémy se sentait irrésistiblement attiré par cette chose, car il l'avait reconnue. Une image qu'il gardait tout au fond de lui, une incarnation qu'il avait imaginé de nombreuses fois. Une vision qui fit quelques apparitions dans ses cauchemars, un ennemi...
- XANA ! s'écria Jérémy
- Oui, mon petit, c'est moi ! Du moins, je suis tel que tu m'imagines... fit l'être sombre, d'un voix crépusculaire
- C'est... c'est vous que je dois voir ?
- Non ! Mon invitée spéciale va arriver...
La pièce se replongea soudain dans le noir total acompagné un grondement sourd. Jérémy ne put faire autre chose que de ne pas bouger, paralysé par un mauvais pressentiment. Quand lumière revint, XANA avait disparu, mais au fond de la salle se tenait à présent une fille aux cheveux roses, habillée d'une veste et d'une jupe rouge.
- Salut Jérémy ! Comment ça va ?
Le jeune garçon avança jusqu'au centre de la salle, elle vint le rejoindre.
- Aelita ! C'est vraiment toi ?
- Oui, mais je ne peux pas rester longtemps, je tenais seulement à te montrer ça...
Elle approcha son visage du sien en le prenant délicatement dans ses mains, elle lui déposa alors un long et passionnant baiser sur ses lèvres. Le jeune garçon était tiraillé. Totalement perdu d'un côté à cause de ces enchaînements d’événements incohérents, de l'autre, il se perdait dans ses sentiments pour Aelita auxquels il pouvait désormais donner libre court. Au bout d'une minute, elle lâcha sa douce étreinte et recula de quelques pas en arrière. Jérémy n'eut pas le temps de se remettre de ses émotions qu'il vit apparaître, tel un fantôme, XANA derrière la jeune fille. Il avait en main un katana dans le même style que celui d'Ulrich.
- Adieu Jérémy ! fit Aelita, d'un ton serein
Un bruit métallique sec se réverbéra dans toute la pièce. Aelita écarquilla soudain les yeux et tomba à genoux au sol, pour finir s'y écrouler en avant. XANA retira alors son épée du ventre de sa victime, maintenant tâchée de son sang. Jérémy se précipita au sol, mais pour mieux constater que son amie venait de rendre l'âme. Il fondit en larmes, sa voix devint tremblante.
- Pourquoi... pourquoi me faire voir ça ? Je n'ai jamais imaginé une chose pareille !! dit Jérémy, la voix larmoyante
- Tu te mens à toi-même Jérémy, répondit calmement XANA. Combien de fois t'es tu passé cette scène dans ta tête sous différentes formes ? Quand elle disait qu'elle quittait une Tour... Quand elle était seule, face à des hordes de mes monstres... A chaque fois qu'elle venait sur Terre, tu avais peur que le programme ne déraille !
- Je me fiche des souvenirs que j'ai voulu oublier ! Ce n'est même pas la réalité !!
- Tu CROIS que ce n'est pas la réalité, mais est-ce que tu en es sûr ? Tu penses que tout ceci n'est pas réel parce que tes amis te l'on dit, ne peux-tu penser par toi-même ?
XANA l'exaspérait au plus haut point. Toujours penché sur le corps d'Aelita, Jérémy prit sa tête en ses mains et la secoua violemment.
- Assez ! J'en peux plus ! Arrêtez ! Sortez de ma tête !! ARRETEEEEEEEEEEZ !!
Dans tout l'internat, un cri déchirant réveilla en sursaut plus de la moitié des pensionnaires. Hélas, pour tous ceux qui sortirent de leur chambre à moitié endormis, il ne fut pas possible de savoir d'où cela pouvait provenir. Dans la chambre d'Ulrich et Odd, seul ce dernier pouvait sans grandes difficultés le deviner. A la première heure, le lendemain, il irait lui rendre visite. Il valait mieux pour lui et pour les autres que le petit génie reste dans sa chambre, en attendant de savoir exactement ce qui lui arrivait.
Etape III : Paranoïa
Le lendemain.
Par chance, et surtout à force d'insistance, Odd réussit à convaincre Jérémy de rester se reposer dans sa chambre pour la journée. Il n'avait pas répondu directement, mais s'était contenté de hocher simplement la tête sans grande conviction. La première heure de classe pour Odd et Ulrich était un cour d'histoire. M. Fumet fit tranquillement l'appel comme il en avait l'habitude. Il s'arrêta quelques instants quand il fut arrivé à Jérémy.
- Tiens, nous avons un absent ! Est ce que quelqu'un peut me dire ce qui arrive à Jérémy ?
- Euh... il se sentait pas bien depuis hier m'sieur ! Il couve une mauvaise grippe ! hésita Odd
Le professeur leva les yeux de sa feuille et regarda le blondinet d'un drôle d'air. Ce dernier croyait déjà voir sa supercherie découverte suite à son ton hésitant, mais le professeur en fut apparemment satisfait et se contenta de dire : "Très bien !". Odd poussa un soupir de soulagement.
- Je te croyais plus doué que ça pour inventer des excuses ! Tu me déçois Odd ! ^^ se moqua Ulrich à voix basse
- J'aurais bien voulu t'y voir ! Quand j'ai vu sa tête ce matin, y avait de quoi te dégoûter de réfléchir !
Le sourire de Odd s'était effacé, laissant place à une inquiétude profonde.
- Ca va si mal que ça ? continua Ulrich
- Tu parles, on aurait dit un mort-vivant ! On disait que Yumi était parano, mais je commence à croire aussi que XANA y est pour quelque chose...
Quelques rangées derrière, Sissi ne pouvait faire autrement que d'être contente en apprenant la nouvelle. Depuis le début de la matinée, elle ruminait sa vengeance contre Jérémy pour l'affront qu'il lui avait fait subir la veille. Cette occasion ne pouvait pas mieux tomber, pensant qu'il avait choisit ce prétexte de maladie pour sortir du collège.
Plus tard, aux alentours de midi, Ulrich et Yumi s'impatientaient devant les portes de la cantine en attendant Odd qui tardait à venir. Ils allaient rentrer, quand le blondinet finit par arriver enfin vers eux, courant et haletant.
- Hé ben Odd ! Ca fait des heures que les frites attendent d'être mangées ! ironisa Ulrich. Qu'est ce que tu faisais ?
- Pas le temps d'expliquer ! Venez vite ! dit-il en s'en retournant déjÃ
Après s'être regardés un instant d'un air de dédain, les amoureux transis suivirent leur ami qui se dirigeait à vive allure en direction du parc. Après quelques minutes de recherche, Odd montra à ses amis une chose inquiétante : un garçon de leur classe, Thomas visiblement, était étendu sur l'herbe, inconscient. On pouvait voir sur sa tempe une grande trace de coup, de laquelle coulait un filet de sang. Odd expliqua qu'il avait rendez-vous avec lui à cet endroit précis afin de procéder à quelques... échanges. Lorsqu'il l'a découvert, il était encore conscient, prouvant que le coup était très récent. Mais il ne put hélas rien dire avant de sombrer dans le néant. Ulrich se pencha sur lui et fouilla rapidement dans ses poches et ses affaires de cours répandues au sol, contre l'avis de Yumi. Il put constater ainsi que son mystérieux agresseur ne lui avait rien volé. D'autant plus étonnant car Thomas était un garçon sans histoires et n'avait aucune raison d'être agressé par qui que se soit du collège. Ils se décidèrent rapidement à aller le porter jusqu'à l'infirmerie. Là , ils eurent la surprise de voir qu'ils avaient un métro de retard : Yolande était déjà en train de s'occuper de trois autres élèves, tous présentant les mêmes ecchymoses sur les tempes que leur camarade de classe. Il le déposèrent doucement sur l'avant dernier lit encore libre et sortirent de la pièce. Une fois derrière la porte, Yumi interpella les garçons.
- Alors, vous vous décidez à me croire maintenant ? fit-elle, un peu contrariée
- Ouais, ça commence à faire beaucoup de coïncidences... T'as gagné Yumi ! répondit Ulrich. Il vaut mieux filer à l'usine pour vérifier !
- J'appelle Jérémy ! fit Odd en sortant son portable
- Non ! On a dit qu'on le laissait tranquille, c'est même toi qui en as eu l'idée ! dit Ulrich
- Je veux bien moi, mais comment on va faire pour...
- Vous en faites pas les gars ! Il m'a donné quelques cours entre temps ! Je devrais savoir me débrouiller sans faire de gaffe cette fois ! interrompit Yumi. On peut bien se passer de Jérémy une petite fois !
En fait, l'idée de devoir peut-être gérer les transferts sur Lyoko sans l'aide du petit prodige ne plaisait pas plus à la japonaise qu'aux garçons, mais ils n'avaient pas le choix. Après une brève concertation, ils retournèrent ensemble au parc et se faufilèrent par les égouts jusqu'au pont de l'usine.
Yumi s'assit face au Super Ordinateur enfila avec un peu de mal le casque audio. Ulrich et Odd se postèrent derrière le siège. Elle semblait en effet plus à l'aise avec les manipulations complexes, nécessaires à la connexion à Lyoko (même si elle consultait très régulièrement l'épais carnet de notes de Jérémy). Le visage virtuel d'Aelita vint bientôt s'afficher sur le moniteur principal.
- Bonjour les amis ! Je ne m'attendais pas à vous voir aujourd'hui !
Elle remarqua soudain que l'opérateur habituel de Lyoko n'était pas le même.
- Jérémy n'est pas avec vous ?
- Jérémy... est un peu malade, il n'a pu venir !
Aelita leva un sourcil, très dubitative. Yumi répugnait plus que les autres à mentir et cela s'entendait dans sa voix. De plus, la fille virtuelle se faisait du souci pour Jérémy depuis la veille. Il s'était contacté, mais il n'a jamais répondu. Pour éviter à Yumi d'avoir à donner d'inquiétants détails, Ulrich intervint.
- Aelita, on a un problème ! Au collège, des élèves ont été agressés par une entité inconnue et à mon avis, ça continue en ce moment !
- Tu n'as rien repéré d'anormal sur Lyoko ? reprit Yumi
- Attendez, je me souviens... lors de la dernière attaque, quand j'ai tapé le code, j'ai ressentit quelque chose d'anormal dans la Tour ! Désolé, je n'ai aucune autre précision...
- Je vais lancer un scan sur le territoire Montagne pour voir, tu peux m'aider Aelita ?
- Ok !
Pendant ce temps, au collège,
Sissi profita de la pause déjeuner pour s'introduire dans les dortoirs sans éveiller l'attention, Jim étant trop occupé à surveiller les éventuels débordements dans la cantine. A cette heure, les couloirs du bâtiment étaient déserts. Sachant que Jérémy fermait rarement sa chambre à clé la journée, elle espérait bien pouvoir y trouver ne serait-ce qu'un indice pouvant lui être utile à sa vengeance. Elle arriva devant ladite chambre et se baissa pour regarder dans le trou de la serrure. La chance était avec elle, la petite pièce semblait vide. Elle jeta un regard à droite et à gauche puis entra discrètement. Un petit ronronnement émanait de l'ordinateur allumé, ce qui fit dire à Sissi de s’attarder le moins longtemps possible en ce lieu, son locataire risquant fortement de revenir bientôt. Elle fit d'abord le tour du lit, fouilla parmi les affaires personnelles de Jérémy dans le placard et regarda même parmi les piles de CDs qui traînaient sur le bureau. Au bout de 10 minutes, elle trouva dans un tiroir une sorte de petit carnet ressemblant à un journal intime. Elle regarda directement la dernière page et vit un petit mot étrange adressée à une certaine Aelita. Un nom qui n'évoquait rien pour la collégienne, mais qui pouvait toujours servir. Elle déchira la page et la plia. Ne voulant pas prendre le risque d'être découverte, elle glissa le papier dans sa poche de pantalon après l'avoir lu succinctement. Elle se retourna vers la porte, quand celle-ci s'ouvrit en grand dans un grincement sec.
- Qu'est-ce que tu fais ici ? fit une voix grave
Sissi aperçut alors le garçon blond à la tête ronde dans l’entrebâillement de la porte. Sa main gauche restait visible, mais la droite était cachée derrière le mur. La collégienne ne dit pas un mot mais s'arma d'un regard mauvais, en évitant toutefois de croiser celui de son interlocuteur. Elle s'avança lentement vers lui en espérant qu'il s’écarterait de sa route, mais il ne le fit pas.
- Je n'ai rien à te dire, laisses-moi passer ! dit sèchement Sissi
- Alors, toi aussi, tu veux me séparer d'elle... je le savais !
La jeune fille fit alors quelques pas en arrière, prise d'une peur soudaine face au ton sinistre qu'employait Jérémy. Toute son arrogance naturelle et le courage qu'elle avait en elle s'envolèrent en un éclair.
- Personne ne me la prendra ! Aelita est à moi ! Tu m'entends : A MOI !!
Sissi commençait à avoir des sueurs froides alors qu'elle trébucha lourdement en arrière, effrayée par la voix et le regard fou de du petit blond. Il s'avança à son tour en fermant la porte, dévoilant enfin ce qu'il tenait dans la main droite. Sissi eut juste le temps d'émettre un cri de détresse, puis elle sombra dans un sommeil forcé.
A l'usine, Yumi en était à son 6ème scanner du Territoire Montagne (4 seulement avaient réussis à démarrer). Celui-ci se solda également par un échec. Aelita était partie entre temps à la recherche de la dernière Tour désactivée, mais une fois à l'intérieur, il n'y avait plus rien à en tirer. Elle reprit contact avec Yumi.
- Je n'ai rien trouvé dans la Tour ! Et je n'ai croisé aucun monstre sur ma route !
- J'ai rien non plus sur les écrans ! Si XANA voulait bien cacher son jeu, je crois qu'il a réussi... dit la japonaise en posant ses coudes sur le clavier.
Odd se rapprocha d'elle, tentant de la réconforter.
- Allez Yumi, te décourage pas ! C'est juste que t'as pas autant d'expérience qu'Einstein !
Il fit une pause.
"Si tu veux, je peux aller sur Lyoko pour aider Aelita dans les recherches ! "
- Bonne idée Odd ! fit la fille virtuelle
- Moi je vais retourner au collège, dit Ulrich, si y a un problème je vous appelle aussitôt !
- OK ! Faites attention à vous les garçons !
Ulrich se dirigea vers le monte-charge sans attendre et remonta rapidement en direction de la salle cathédrale, tandis que Odd descendit par une trappe en acier du labo vers les scanners. Yumi mit alors en place le protocole de transfert.
- Transfert Odd... "Ca à l'air d'aller !" pensa t elle. Scanner Odd... "J'espère que je ne fais pas encore une gaffe..." VIRTUALISATION !!
Ulrich avait emprunté une nouvelle fois le chemin des souterrains pour revenir au collège. Arrivé au niveau de la plaque d'égout, il la souleva furtivement en jetant un regard de chaque côté avant de sortir. Il se dirigea ensuite vers la cour. Il était près de 13h 15, l'enceinte du collège commençait à se remplir des élèves sortant de la cantine et des internes revenant de chez eux. Le jeune garçon ne remarqua rien d'anormal à première vue, il décida donc de monter aux dortoirs pour rendre une visite éclair à Jérémy, qui devait se sentir bien seul aujourd'hui. Il s'en alla vers le bâtiment et se préparait à y entrer, quand il faillit recevoir la porte sur la figure, poussée avec brusquerie par la personne qui en sortait. Il fit un bond en arrière pour s'écarter du passage et vit Jim courrant à vive allure en direction de l'infirmerie. Il tenait une élève inconsciente dans ses bras : Sissi ! Le surveillant était passé trop rapidement et Ulrich ne put pas voir l'état de la jeune fille. Il décida de les suivre. Il se posta derrière la porte et l'entrouvrit légèrement. Il s'aperçut que tous les lits étaient vides, les élèves présents avaient dû être envoyés à l’hôpital. Pourtant, au fond de la pièce, autour du lit où Jim eut déposé Sissi, il vit aussi Yolande et le Proviseur. Ce dernier passa tristement sa main sur le front de sa fille.
- Jim ! Comment est-ce arrivé ? demanda-il
- Je n'en ai aucune idée Monsieur ! J'ai été prévenu par deux élèves de 5ème, comme quoi ils avaient entendu un cri venant de l'internat ! J'ai fouillé les étages pendant une bonne 1/2 heure et je l'ai trouvée allongée sur le sol... au beau milieu de la chambre de Jérémy Belpoix !
- Jérémy ! Vous en êtes sûr ?
- Oui Monsieur ! Je suis aussi étonné que vous, c'est un élève très calme... vous savez, je pense qu'il y a peut être un rapport avec lui et tous ceux qui ont été envoyés...
- Pas de conclusions hâtives, s'il vous plait ! fit le proviseur en essayant de cacher sa colère
L'homme entre deux âges se tourna vers Yolande qui continuait d'examiner la fille.
- Alors ?...
- Elle a subie plus de coup que les autres et il ont été donnés avec plus de force... Il se peut même qu'elle ait plus que des blessures superficielles...
- Je vais rappeler une ambulance ! intervint Jim
Il se dirigeait déjà vers la porte mais il fut retenu par le proviseur.
- Attendez Jim ! Je vous charge aussi de retrouver Jérémy, et de l'amener à mon bureau !
- Mais vous venez de dire que...
- Je ne l'accuse pas ! Mais s'il sait quelque chose sur cette histoire, je tiens à l’entendre !
- Compris Monsieur !
Ulrich se plaqua contre le mur à côté de la porte. Heureusement, Jim sortit de l'infirmerie par le côté opposé. L'homme à la barbe grise s'assit sur une chaise à côté du lit pendant quelques minutes. Il la fixait tristement, comme si elle n'allait plus jamais se réveiller. Mais il fut rappelé par ses devoirs et il finit par se lever. Il sortit de la pièce pour aller rejoindre son bureau. D'étranges sentiments envahissaient l'esprit d'Ulrich. Devait-il croire ou non ce qu'il avait entendu, que devait-il en penser ? Après quelques réflexions, il entra sobrement. Yolande le remarqua dans l'instant.
- Oui, qui a-t-il ?
- Je viens voir Sissi !
- Désolé, mais elle est inconsciente. De toute façon, l'ambulance qui vient la chercher ne va plus tarder !
- S'il vous plaît, juste une minute... c'est... il eut soudain une boule dans la gorge, bloquant presque ce qu'il allait dire. C'est ma petite amie !
- Très bien, mais je conseille de pas vous attarder ! Je dois m'absenter, mais je serais de retour rapidement !
Elle sortit également de la pièce, laissant Ulrich seul avec Sissi. Elle faisait peine à voir : elle avait des énormes bleus un peu partout sur le corps, certaines parties saignaient plus que d'autres. Même évanouie, elle dégageait vraiment une impression de souffrance. Dans la tête d'Ulrich défilait les images de tous les chantages et les coups tordus qu'elle avait pu faire, à lui et à ses amis. Une infime partie de lui voulait se réjouir, mais c'était impossible. Elle avait peut être fait bien plus de mal que de bien autour d'elle, mais elle ne méritait pas ça. Comme si les pensées d'Ulrich l'avaient atteint, elle entrouvrit les yeux.
- U... Ulrich ? C'est bien toi ? fit-elle d'une voix douloureuse
- Oui...
Le jeune homme était un peu coincé. Que pourrait-il bien lui dire pour expliquer ce qui se passait, pour la rassurer. Il était même devenu difficile de simplement lui parler. D'un seul coup, alors qu'il était d'ordinaire si facile de l'envoyer balader, engager une simple conversation lui paraissait être une tâche insurmontable.
- Comment tu te sens ? finit il par dire
- J'ai mal... j'ai mal partout... et c'est ma faute !
- Qu'est ce que tu veux dire ?
- J'ai... voulu jouer les espionnes, j'ai été dans la chambre de Jérémy pour trouver... un truc pour me venger... c'est lui qui m'a fait ça ! Je sais que tu ne me crois pas... mais c'est vrai !
Ulrich resta bouche bée face à cette révélation. Il fut d'abord dubitatif, mais le ton de la jeune fille semblait si sincère qu'il était plutôt ardu de ne pas la croire. Sissi lui dit alors de fouiller dans sa poche droite, là où elle avait gardé le mot qu'elle avait déchiré dans la chambre. Ulrich le lut attentivement :
"Aelita, je ne peux plus vivre sans toi ! Au diable XANA ! Les autres sont incapables d'en venir à bout... ou alors ils le font exprès ! Oui, c'est ça ! Ils veulent tous m'éloigner de toi, ils veulent nous empêcher d'être ensemble et d'être heureux ! Mais ne t'en fais pas, je ne les laisserais pas faire... Je vais m'occuper d'eux un par un et enfin, on pourra enfin être tranquilles, tous les deux..."
Même ce qu'écrivait Jérémy n'avait plus de sens, le problème était donc bien plus grave qu'il n'y paraissait. A la fin de la lecture, Ulrich se tut et se leva d'un bond de sa chaise.
- Ulrich... attends ! S'il te plaît, ne... me laisse pas seule, reste ! fit elle d'une voix presque larmoyante
Il réfléchit un instant, puis il alla se rasseoir près d'elle, en attendant l'ambulance qui ne devait plus tarder.
Sur Lyoko, Odd et Aelita avaient écumé une bonne partie du territoire Montagne, sans succès.
- Yumi, toujours rien sur les écrans ? demanda Odd
La japonaise ne répondit pas, dans le labo, on put seulement entendre le bruit d'un objet métallique tombant sur le sol.
- Yumi ?!
Etape IV : Dois-je lui faire confiance ?
Yumi tomba violemment du siège de commande, frappée à la tête par une barre de fer. Une silhouette vint se planter devant elle, s'assurant qu'elle était bien inconsciente, puis elle lâcha l'arme contondante. Jérémy n'avait plus ses lunettes. Ses yeux étaient très rouges, à tel point qu'on ne distinguait presque plus la couleur naturelle de la rétine. A l'aide de quelques ficelles, il lia aussi solidement que possible les poignets et les jambes de la japonaise et la déposa contre un mur de la grande pièce. Il se dirigea vers le siège de commande et ramassa le casque audio.
- Ulrich vient d’appeler Yumi, elle a dû repartir tout de suite... fit sombrement Jérémy
- Einstein !? Je croyais que je t'avais dit de te reposer aujourd'hui !? fit Odd sur un ton faussement autoritaire
- Je sais, mais je me sens mieux maintenant !
Pour la 1ère fois, Aelita sentait que Jérémy mentait, il faisait cela aussi mal que Yumi. Mais elle ne dit rien, préférant imaginer qu'il devait avoir une bonne raison.
- Jérémy ! Est-ce qu'il y a eu des événements anormaux sur Terre ? On pense que XANA a activé une Tour quelque par dans les Montagnes !
- OK ! Odd, escorte Aelita à la Tour la plus proche, j'ai besoin d'elle sur Terre, tu continueras à chercher après ! ordonna t il sans vraiment écouter son amie
- Euh... t'es sûr ?! fit Odd
- Ouais ! On dirait que le problème est lié au Supercalculateur lui-même, mais je peux pas y travailler rapidement dessus tout seul !
Il marqua une pause.
- Au fait, vous avez eu des nouvelles d'Ulrich ?!
- Ben sur Lyoko, on entend pas trop ce qui se dit ! fit Odd, perplexe. Mais je pense que Yumi nous aurait avertis si elle avait reçu un coup de fil !
Lui et Aelita étaient toujours en train de courir au travers des petits sentiers montagneux, quand le guerrier félin attrapa le bras d'Aelita pour l'arrêter. Au vu ce que leur disait Jérémy, cela ne servait plus à rien de courir.
- Bon, alors où est-ce qu'on peut trouver une Tour désactivé dans le coin, Monsieur le guide ?
- Il y en a une à 800 mètres, au Nord Est de votre position ! Allez-y !
Les deux ados virtuels se mirent en quête de la Tour. Tout le long de la route, le blondinet fut assaillît par de nombreux doutes. Et par un pressentiment inexplicable lui faisant dire qu'il se passait quelque chose d'anormal... et ça n'était pas XANA. Après avoir croisé et détruit quelques Kankrelats sur leur chemin, ils arrivèrent au pied de la bâtisse cylindrique. Odd voulut rester dehors en attendant qu'Aelita fut transférée, mais cette dernière lui signe de l'accompagner. Les doutes du guerrier félin étant visiblement contagieux. Ils avancèrent en douceur jusqu'au milieu de la plaque inférieure et s'élevèrent ensemble à l'étage. Après avoir entré le Code Terre, la fille virtuelle se plaça au centre de la plate forme.
- Je suis prête Jérémy !
- OK, je lance le programme !
Aelita s'éleva encore d'une dizaine de mètres du sol. Son corps numérique se mit à s'illuminer d'une blancheur aveuglante pour finir par se décomposer, entamant la phase de matérialisation. Odd attendit sur place avec une certaine anxiété, comme s'il avait peur la Tour ne s’effondre sur lui. Sans prévenir son ami, Jérémy lança un autre programme disponible mais dont il ne s'était jamais servi auparavant. Il descendit ensuite du siège et se dirigea vers l'ascenseur, rejoignant rapidement la salle des scanners. Ce fut une magnifique synchronisation avec Aelita qui fit son apparition en chair et en os en sortant du 3ème scan. Cela faisait presque 2 semaines qu'elle n'avait pas pu revenir sur Terre. Elle aurait voulu sauter au cou du petit génie, l'étreindre tendrement dans ses bras et le regarder rougir en riant, ou même tout simplement être contente de le revoir face à face. Mais elle ne bougea pas en le voyant s'approcher d'elle. Au travers de ses yeux sans lunettes, elle distinguait une très grande confusion.
- Viens Aelita ! dit il simplement
Il lui prit la main et l'entraîna vers le monte-charge. Là , elle eut la confirmation que Jérémy avait changé : la fermeté de son geste en disait long sur son état d'esprit. Elle voulut résister, mais ses sentiments pour lui (bien qu'elle n'ait encore qu'une très vague idée de ce dont il s'agissait) l'en empêchaient. Une fois devant le Supercalculateur, il se mit à changer, modifier et brider plusieurs circuits imprimés avec l'aide d'Aelita. Même à deux, la complexité des manipulations délicates allait leur prendre du temps. Contrairement à lui, la fille aux cheveux roses n'avait pas l'air de savoir exactement ce qu'elle était en train de faire. Elle n'osait cependant pas poser de questions, ce que faisait Jérémy ne pouvait pas être mal...
Dans le labo, Yumi émergea lentement, avec un énorme mal de crâne et la désagréable surprise de ne pas pouvoir bouger. Elle voulait plus que tout pouvoir se lever, pour atteindre la console et tenter de prévenir Odd et Aelita (qu'elle croyait toujours sur Lyoko) de la menace que représentait Jérémy. Il lui avait aussi pris son portable et l'avait déposé à côté du clavier. Ce dernier se mit tout à coup à sonner, 5 fois, puis plus rien. La seule autre personne qui aurait pu appeler était Ulrich. La japonaise espérait que ne décrochant pas, il aurait le réflexe de se rendre à l'usine. Ce dernier était maintenant le seul groupe toujours libre de ses mouvements. Le seul à pouvoir encore faire quelque chose pour arrêter Jérémy. Hélas, personne à part lui n'avait une idée de ce qu'il préparait.
Dans la Tour sur Lyoko, Odd attendait toujours en faisant le tour de la plate forme supérieure, commençant à trouver le temps long. Il ressentit alors une sensation des plus étranges : il vit un compte à rebours sur l'écran principal du Superordinateur... Aelita tombant violemment sur le sol métallique du le labo... le visage effaré de Yumi... puis, plus rien. Il se réveilla à quatre pattes, toujours dans la Tour. C'était une vision, plus violente que les autres, car elle concernait uniquement le monde réel. Il criait, avertissant qui voulait bien l'entendre de ces inquiétants présages, mais personne ne pouvait lui répondre, pas même Yumi.
Dans la salle du Supercalculateur, il y eut soudain une baisse de tension. Les lumières se mirent à clignoter pendant quelques minutes dans toute l'usine. Ils en avaient terminé.
- Jérémy... dit Aelita, de moins en moins confiante.
Il avait un sourire malsain aux lèvres.
- On remonte au labo, j'ai un truc à te montrer !
Etape V : Larmes salvatrices
Au collège, Ulrich attendit patiemment aux côtés de Sissi, qui s'était à nouveau évanouie, l'arrivée de l'ambulance. Lorsque les médecins la transportèrent de l'infirmerie au véhicule d'hôpital, le jeune homme en avait presque la rage au coeur. Ce fut encore une fois pour Sissi une occasion de se rendre compte qu'elle était plus faible qu'elle ne voulait l'admettre. Car même dans les moments où elle voulait à tout prix paraître forte, Ulrich avait bien remarqué qu'il fallait toujours quelqu'un à ses côtés pour la soutenir. Malheureusement cette prise de conscience allait une nouvelle fois être réduite à néant par le retour dans le temps... en supposant qu'il y aurait bien un retour dans le temps.
Il essaya de téléphoner à Yumi, mais elle ne répondit pas au bout de 8 sonneries, ce fut la même chose pour Odd, et Jérémy semblait avoir coupé le sien. Il se dirigea vers l'internat et entra dans la chambre de Jérémy restée ouverte. L’ordinateur était toujours allumé, l'écran affichait alternativement et très rapidement deux images : une matrice qui défilait, et le signe de XANA. Si Jérémy n'était plus ici, c'est qu'il devait trafiquer quelque chose à l'usine. Ulrich avait désormais la confirmation absolue après toutes ces agressions que le petit génie n'était plus aussi sein d'esprit.
Sur Lyoko, toujours personne n'entendait Odd.
Il sortit de la Tour, et chercha dans les environs un groupe de monstres, ou au pire un Kankrelat.
- You houuuu ! Les monstres ! Mon Dieu, j'ai plus de Flèches lasers ! Comment je vais m'en sortir ! Si on vient m'attaquer maintenant, je vais sûrement me faire dévirtualiser !!
Les vociférations et les gestes profondément exagérés du guerrier félin résonnèrent dans la Montagne, mais pas une seule bestiole ne vint à sa rencontre. Il cherchait à tout prix un moyen de se faire remarquer par qui voudrait bien l'entendre... mais la seule chose qu'il pouvait faire de là où il se trouvait, était d'imaginer à quoi exactement correspondaient ses visions. Sortir de Lyoko par un autre moyen que la dévirtualisation étant impossible.
Jérémy remonta au labo accompagné d'Aelita, il s'assit sur le siège et la jeune fille se mit derrière. Il pianota quelques commandes sur son clavier et s'en suivit l'apparition d'une fenêtre sur un des écrans latéraux. Une fenêtre affichant "30 : 00 : 00". Les chiffres restèrent statiques un instant, puis ils commencèrent à descendre : Un compte à rebours.
- Jérémy ! Qu'est ce que ce passe ? Explique-moi ! s'inquiéta Aelita
- Tu vois, on vient de reprogrammer le programme de retour dans le temps sur le Supercalculateur. Ca va nous permettre de créer une bulle temporelle sans avoir à chercher et désactiver une Tour ! Mais ça va prendre une 30ène de minutes pour que le programme soit totalement chargé. expliqua soigneusement Jérémy
- Alors, il n'y avait pas de Tour activée sur Lyoko !
- Non, c'est vrai. Toi et Odd auraient cherché pour rien !
- Mais, depuis quand sais-tu faire ça ? Même dans les archives du supercalculateur, je n'avais jamais vu que l'on pouvait activer la bulle temporelle sans une Tour !
- Ca, je... n'en sais rien. C'est comme si la manœuvre avait été gravée dans ma tête depuis tout petit... enfin, ça a pas d'importance !
- Qu'est ce que tu comptes faire ? demanda t elle sans que son air inquiet ne s'efface
- Je viens d'entrer nos deux profils dans l'ordinateur... comme ça, le retour dans le passé effacera définitivement tout ce monde cruel ! Ce monde qui veut notre perte ! Après, on pourrait enfin être tranquilles...
Aelita n'en croyait pas ses oreilles. Etait-ce ce sentiment qu'elle n'arrivait pas à définir, ou la folie pure et simple qui poussait Jérémy à tenir un tel discours ? Elle l'avait aidé à réaliser cela, sans se préoccuper de savoir si cela était bien ou mal. Jamais elle n'aurait douté qu'il voulait aller si loin. Le compte à rebours avançait lentement, mais sûrement.
- Jérémy ! Tu peux pas faire ça !! C'est XANA qui te manipule ! Je t'en pris résiste !!
- XANA n'y ait pour rien... enfin, presque. Une fois que tout les autres auront disparut, qu'il le prenne ce monde !! Tant qu'il sera occupé, on pourra rester ensemble... vivre heureux !
Il descendit du siège et s'avança vers Aelita pour lui prend doucement les mains. Elle recula de quelques pas, effrayée.
- Tu... tu me fais peur ! Le Jérémy que je connais s'acharnait à trouver un remède à mon virus ! Désactiver XANA était pour lui nécessaire pour ma sécurité mais aussi pour ses amis...
- Et bien ce Jérémy là avait tort ! répondit il brutalement. Ensemble, je t'apprendrais tout Aelita ! Si je laissais les autres le faire, ils te feraient du mal, je ne veux pas qu'il t'arrive malheur... c'est pour ça que je vais le faire, c'est pour ça que les humains doivent disparaître !
Jusqu'à présent, Yumi, toujours ligotée, n'avait rien dit et s'était contentée d'écouter. Elle n'affichait pas d'inquiétude comme Aelita, mais plutôt une colère contenue qu'elle n'arrivait pas exprimer face à un ami.
- Jérémy ! Réfléchis une minute ! On est tes amis ! Et tu peux pas condamner le monde entier pour être responsable de tous les malheurs, tu peux pas décider ça !
Aelita dirigea son regard vers l'endroit d'où provenait la voix. Elle n'avait pas remarquée que la jeune asiatique ait été ligotée dans un coin sombre de la pièce. Etait ce aussi Jérémy qui avait fait cela ? Lui, regarda un instant Yumi et ramassa la barre de fer avec laquelle il l'avait assommée. Il semblait assez énervé mais il continuait à parler d'une voix calme et posée. Pendant que tous les regards étaient braqués dans une seule direction, personne ne remarqua qu'à quelques mètres au-dessus du sol du labo une grille d'aération s’ouvre. Elle dévoila une forme humaine qui se glissa discrètement jusque derrière le socle de l'holomap.
- Yumi... depuis qu'on a découvert XANA et Aelita, on s'est engagé à changer le monde ! On aurait très bien pu ne jamais répondre à son appel et la laisser se débrouiller toute seule ! Mais en acceptant de l'aider, on s'est tous engagé à changer les choses, sans l'accord de personne... alors je suis en droit moi aussi de décider de le changer ! Même si je ne vaux pas mieux que XANA, je m'en fiche !
Yumi prit un air profondément apeuré quand Jérémy leva sa barre de fer bien haut. Il semblait décidé à en finir avec elle avant le retour dans le temps. Aelita tenta de le maîtriser en lui enserrant le torse, mais elle fut brutalement écartée et tomba violemment.
- Désolé Aelita mais c'est pour notre bien que je fais ça...
La barre était prête à fracasser le crâne de la pauvre Yumi qui ferma les yeux au bord des larmes.
- Désolé aussi Jérémy !
Le petit prodige tourna la tête, juste à temps pour voir un extincteur s'abattre sur le côté de sa tête. Il chut lourdement à terre, inconscient. Son mystérieux agresseur, se pencha sur lui pour vérifier son état. Il n'avait apparemment rien de casser.
- Ulrich !! cria Yumi, soulagée.
Il alla aider Aelita à se relever (elle avait du se froisser un muscle sous l'effet du choc) et détacha rapidement les liens de Yumi.
- Bon, maintenant que notre opérateur fou pique un roupillon, vous voudriez bien m'expliquer ce qui se passe ?
- J'ai... j'ai aidé Jérémy à modifier XANA. On a programmé nous-mêmes un retour dans le temps... mais il va effacer tous les habitants de votre monde ! expliqua nerveusement Aelita en se tenant le bras.
- Quoi ?! Mais qu'est ce qui t'es passé par la tête ?! Si tu le savais alors pourquoi tu ne l’as pas arrêté !? s'énerva Ulrich
- Calme-toi ! dit Yumi. Aelita ne savait pas ce qu'elle était en train de faire ! Elle faisait totalement confiance à Jérémy, elle ne s'est pas posée de questions...
- Oh ! Euh... désolé Aelita... fit Ulrich, à présent gêné.
- C'est pas grave, c'est toi qui as raison. Mais on peut encore changer les choses !
- Comment ça ?
- Ce retour vers le passé manuel prend du temps ! Il reste 20 minutes sur que le compte avant que le programme ne s'initialise. Je pense que je peux encore reconfigurer le programme.
Yumi qui continuait à se frotter ses poignets endoloris, regarda par hasard sa montre : Il était 14h 23, les cours avait repris depuis environ une heure. Elle déclara :
- Je vais retourner au collège, c'est un peu tard pour passer inaperçue ! Mais si on est absent trop longtemps sans explication...
- Vas-y Yumi, on devrait pouvoir se débrouiller avec Aelita ! fit Ulrich
Elle hocha la tête et récupéra son sac qu'elle avait déposé près du monte-charge en arrivant. Elle s'y engouffra pour remonter en direction de la cathédrale de verre. Immédiatement, malgré la désagréable douleur qu'elle ressentait dans son bras gauche, Aelita se mit à taper frénétiquement sur le clavier du Super Ordinateur. Elle avait besoin d'Ulrich afin qu'il puisse brancher et débrancher certains câbles du labo reliés à XANA, à des moments précis.
Pendant ce temps sur Lyoko, Odd s'occupait comme il pouvait, narguant et faisant des grimaces aux Blocks et aux Kankrelats qui s'étaient postés devant la Tour. Aucun de ses monstres ne s'était encore décidé à l'attaquer. En fait, c'était pour lui une façon de chasser l'inquiétude qui le rongeait depuis qu'il avait eu ces visions... et qu'il était dans l'impossibilité de faire quoi que se soit pour aider ses amis.
Il ne restait plus que 11 minutes, quand Aelita arrêta enfin les mouvements incessants de ses doigts sur le clavier. Le retour vers le passé ne pouvait pas être arrêté. Cependant, Elle n'avait maintenant plus qu'un seul geste à faire pour que son nouvel effet dévastateur soit annulé.
- Aelita... tu es sure que ça marchera ? fit Ulrich
- Certaine ! J'ai fait les calc... AIE !
- Ca va ?
- J'ai encore mal au bras, mais ça se soignera après le ret...
La fille aux cheveux roses ne termina pas sa phrase qu'Ulrich s'écroula au sol devant elle, brusquement frappé par une barre de fer. Derrière lui, se dressait une silhouette au regard fou : Jérémy se tenait la tête d'une main et le bout de ferraille de l'autre.
- Je suis désolé aussi Ulrich... fit-il sur un ton méprisant.
Surprise, Aelita voulut tout de même appuyer sur cette dernière touche qui les aurait tous sauvés de ce cauchemar. Mais d'un geste vif, presque surnaturel, Jérémy lui attrapa la main et la serra pour dissuader son amie.
- Aelita ! Il t'a embrouillé l'esprit à toi aussi !
- Jérémy ! Arrête, tu me fais mal !
Il lui lâcha la main mais la repoussa hors de portée du clavier. Il restait encore 8 minutes avant l'apocalypse blanc, tout paraissait déjà joué.
Pourtant, Aelita ne perdait pas espoir. Dans cet esprit bouleversé et chaotique, résidait encore une petite partie de l'ancien Jérémy.
- Désolé Aelita, mais c'est pour ton bien que je fais ça... c'est pour notre avenir !
La jeune fille détourna son regard de Jérémy. Il y avait dans ses yeux une expression de tristesse comme jamais elle n'en avait eu sur Lyoko ou sur Terre.
- Jérémy, ce n'est pas vrai. Il n'y a aucun avenir dans le monde que tu me proposes, ni pour moi, ni pour toi...
Pour la première fois depuis le début de sa démence, on constatait un changement d’attitude chez Jérémy. Il devint soudain hésitant, sa voix était tremblante. Il n'avait aucune réponse à donner à son amie.
- Aelita... que... qu'est ce que tu racontes ? On aura le monde pour nous deux ! Rien que nous deux !
- C'est justement ça que je refuse. Comprends-moi, je veux par-dessus tout rester avec toi... mais je ne pourrais pas vivre dans un monde sans vie... un monde qui n'est pas différent de Lyoko...
Plus que 5 minutes avant la fin du compte à rebours. Jérémy ne pouvait pas parler, il avait maintenant la gorge complètement nouée, pris entre deux sentiments.
- J'apprends beaucoup de choses grâce à toi, même si parfois j'ai du mal à tout comprendre !
Elle afficha un demi-sourire qui ne dura qu'un instant.
"Mais Jérémy, c'est aussi parce que je suis entouré de nos amis et de tous les autres gens, que j'apprends à devenir plus humaine, c'est même toi qui me l'avais dit. Ca m'aide aussi à comprendre petit à petit ce sentiment étrange que je ressens... Des fois, quand je suis prêt de toi, j'ai des rougeurs qui apparaissent sur le visage, un peu comme quand Yumi est avec Ulrich. Je sens mon cœur qui bat à toute vitesse et ma température corporelle se met à grimper. Quand je viens sur Terre, j'ai tout le monde autour de moi qui me rassure, qui essaie de m'expliquer... C'est quelque chose d'étrange et qui me fait parfois peur, mais j'ai envie de savoir ce que c'est ! Tout doucement, avec l'aide des autres. Si tu décides d'aller jusqu'au bout, je... je saurais peut être ce que je ressens... mais je ne le comprendrais jamais...
Une larme coula le long de sa joue et termina sa course sur le sol métallique du labo. Ne pouvant plus réprimer ses larmes, elle éclata en sanglot.
- Jérémy... si tu ne souhaites vraiment qu'on soit heureux... je t'en pris... reprends-toi et annules le programme... je t'en pris !
Le petit génie tomba à genoux en se tenant la tête des deux mains. Il regarda à côté de lui le corps inanimé d'Ulrich.
"Qu'est ce que j'ai fait, mais qu'est ce que j'ai fait ?!" se répétait-il.
Dans son esprit défila tous les événements passés de ces dernières 24 heures. C'était comme la traversée d'un long tunnel, un tunnel qui n'en finissait pas. Mais au bout d'un moment, il put enfin en voir la fin. Il vit à ce moment dans ses pensées, une lueur qui prit forme : Une fille aux cheveux roses.
Jérémy se releva enfin, tel un zombie sorti de terre et s'assit en tremblant de tout son corps sur le siège de commande. Les dernières 30 secondes étaient en train de défiler sur le moniteur principal, quand le doigt de Jérémy appuya avec lenteur sur la touche ENTREE Cela ouvrit instantanément une fenêtre sur l'écran, indiquant : "Programme additionnel effacé".
Plus que quelques secondes de répit, juste le temps pour Jérémy de se retourner vers Aelita, toujours en larme, mais qui avait retrouvé le sourire.
- Retour... vers... le passé...
Puis il sombra dans l'inconscience, s’effondrant sur le clavier.