Histoire : x Léna - épisode 1 - Une nouvelle vie

Écrite par Scotland Girl le 23 juillet 2009 (4218 mots)

Dernière édition le 27 juillet 2009

x Introduction - Léna


« Your gonna make it,
Yes your gonna make it,
Don't you worry about a thing that's happened in your life !
Your gonna make it,
Yes your gonna make it,
Don't you worry about a thing it's gonna be all right ! »


Mes écouteurs sur les oreilles, j'écoute en boucle cette chanson que j'adore tellement. Des larmes coulent lentement le long de mes joues, tandis que je longe un parc dans ma nouvelle ville... Ma nouvelle vie. Je me promène dans le froid polaire de cette nuit d'hiver, vêtue d'un minishort en jean et d'une tunique légère, pieds nus et en sang. J'avance aussi silencieusement qu'une ombre, tel un chat à l'affut d'une proie. Depuis des heures.
Je sens soudain quelque chose se glisser dans ma poche et en ressortir précipitamment, avant que mes écouteurs ne s'arrachent de mes oreilles. Me retournant vivement, j'aperçois un duo de garçon d'environ vingt ans glousser en s'éloignant, mon Ipod v.4 dans les mains. Essuyant rapidement mes larmes, je leur lance d'un air rempli de menaces :

-Eh ! C'est à moi ça, bande de c*nn*rds !

Ils me regardent alors, avant de ricaner méchamment et de s'approcher de moi. Je sens le souffle de l'un d'eux me caresser le cou, empestant l'alcool à plein nez. Et m*rd* ! Il fallait que je tombe sur des bourrés ! Tant pis, c'est mon Ipod après tout. Le deuxième m'observe soudain des pieds à la tête, et un regard désireux apparait au fond de ses yeux.

-Eh ben ! A part tes pieds amochés, t'es drôlement mignonne, ma chérie !

-Ouais, t'as pas tort, Gustave !

-La ferme, Lucas ! C'est moi qui cause ! Alors, ma belle, d'où tu viens, à pieds nus comme ça ?

-Franchement ? Ça te concerne pas, mon moche !


Le prénommé Lucas éclate de rire. Ça se voit dans sa façon d'obéir à l'autre, qu'il est idiot... Ce dernier, d'ailleurs, ne semble pas enchanté de ma remarque. Un demi-sourire apparait sur son visage. Et, sans prévenir, il me saisit la bouche d'une main et la taille de l'autre, avant de me plaquer contre lui, avant de m'emporter vers le parc vitesse lumière, suivit de son sbire.

-Alors, tu te crois toujours aussi maligne, ma jolie ?

Il me fait tomber au sol et place ses jambes de chaque côté de ma taille. Grave erreur, mon chou. D'un mouvement brusque, je relève le genou et frappe dans sa partie intime. Le souffle coupé, il bascule sur le côté, et gémit doucement. Me redressant rapidement, je ramasse mon Ipod et lui murmure quelques mots en guise d'adieu. Etonné, Lucas me fixe sans bouger, bouche bée.

-Ouais, mon joli, je me crois toujours aussi maligne !

Sans prêter attention à Lucas, je sors du parc avec dignité avant de partir en courant. Gustave devrait bientôt se lever, je n'ai pas envie de l'affronter deux fois...
Une fois mes écouteurs à nouveau pendouillant sur mes oreilles, la musique se répand dans tout mon cerveau et m'ennivre. Je cours de plus en plus vite sans prendre compte de la douleur qui m'irradie les pieds. Les arbres et les maisons défilent à mes côtés, flous. Jusqu'au moment où la douleur est trop insupportable. Je finis par m'effondrer sur un banc, à bout de force. Parfaitement coordonnée avec mes sentiments, la musique change soudain pour diffuser une douce mélodie mélancolique, et les larmes me montent aux yeux. Pourquoi est-ce que ma vie a pris une telle tournure ? Qu'avais-je fais pour mériter un sort pareil ?... Toutes ces questions se mélangent dans ma tête sans trouver de réponse.

Et tout devient noir.















x Chapitre 1 - La jeune fille qui ne voyait pas


Des voix... Floues... Je n'entends rien. Des formes bougent devant moi... Et le noir revient encore. Je lutte, je tombe, je tombe... Je me relève, je lutte, et... je gagne. Des silhouettes étranges se précisent au-dessus de moi. Je me rend compte que je suis couchée sur quelque chose de mou... um matelas ?! Je me suis évanouie sur un banc, pourtant !
Un doute m'assaille soudain. Mon Ipod v.4 ? Ouf, il est à côté de moi. J'y tiens comme à la prunelle de mes yeux ! Normal, c'est un cadeau de mes parents...
Je me rend soudain compte, dans la chambre où je me trouve -pas une chambre d'hôpital, fort heureusement-, que deux personnes m'observent avec inquiétude. Serait-ce ...? Non, c'est impossible ! Je cligne des yeux, et soupir à la fois de tristesse et de soulagement. Les personnes assisent sur les chaises autour de mon lit ne leur ressemblent pas. Il s'agit en fait d'une jeune fille de mon âge, blonde, et très certainement partiellement asiatique, vu ses jolies yeux bridés bleu ciel. Elle porte une chemise à manches courtes et une petite jupe plissée, genre fifille à sa maman. C'est ses cheveux qui me surprennent le plus : ils sont tout droit sortis d'un manga, avec ses deux couettes hauts placées dont la mèche central descend jusqu'à ses genoux !
L'autre est une femme d'une trentaine d'année, très certainement la mère de la jeune fille. Elle possède de courts cheveux coiffés à la mode, ainsi q'une frange qu'il ne lui couvre juste pas les yeux. Vu son habillement, c'est une de ces femmes complètement givrée de mode : bustier bleu très sexy, minijupe blanche style gitan et ballerine rayées bleu et blanc. Il me semble l'avoir déjà vue quelque part, celle-là...

-Regarde maman, elle est réveillée !

-J'ai vu, Mizuki. Tu vas bien, ma petite ?


Je répond d'un hochement de tête, incapable de répondre tellement ma gorge me fait mal.

-On t'a trouvé sur un banc, près du parc. Tu avais l'air mal en point, alors on t'as ramenée à la maison. Je suis contente que tu sois réveillée, ça fait trois jours que tu es restée dans le coma !

Trois jours ? Au moins, je n'aurais plus de problèmes de sommeil, c'est déjà ça... Jetant un coup d'oeil autour de moi, je remarque que la décoration est à l'image de la dame aux cheveux noirs : murs bleu marine, les derniers meubles de chez Zadic, des objets divers qui s'arrachent à prix d'or... Des riches quoi !

-Tu veux un verre d'eau ?

Comme avant, j'agite la tête de bas en haut, toujours aussi incapable de dire le moindre mot.

-Elle a dit oui, Mizuki. Tu vas le chercher ? Et prend un médicament pour la gorge, en même temps. Je crois qu'elle a mal !

La jeune fille blonde acquiesce en souriant et quitte rapidement la pièce. J'en profite pour m'examiner : je porte toujours mes vêtements, mais par contre, j'ai des bandages aux pieds, ainsi qu'un guérisseur au visage. La jeune femme aux cheveux noirs s'exclame soudain :

-Oh, mais je manque à tous mes devoirs ! Je m'appelle Yumi, et la jeune fille que tu as vu tout à l'heure, c'est Mizuki. Et toi, comment te nommes-tu ?

Aïe ! Comment je fais pour répondre ? Je me met à faire des gestes étranges, avant de désigner ma gorge, pour tenter de lui expliquer que je ne peux pas parler. D'abors incrédule, la dénommée Yumi comprend vite ce que je veux dire et sort un bloc et des stylos d'un tiroir, avant de me les tendre.

-Tiens ! Tu n'as qu'à écrire !

Je la remercie du regard et entreprend d'écrire mon nom sur le bloc note à l'aide d'un stylo violet à paillettes : « Léna ».

-Léna ? Très joli ! Et tu écris avec soin, c'est une qualité que j'aime beaucoup !

Je lui souris timidement, pas franchement convaincue. Mon sourire disparut lorsque des souvenirs remontèrent du fond de ma mémoire. Maman... Papa...

-Au fait, ou vis-tu ? Tu n'as pas de CI sur toi, juste ton Ipod v.4...

Non ! Je ne voulais pas me souvenir... Au fait, pouvais-je me souvenir ?... Fouillant un instant ma mémoire, je ne rencontre que le noir, le noir complet, l'effrayant noir... Moi ? Amnésique ?...
J'écris en hâte la situation noir sur blanc et tendit le bloc à Mme Yumi. Juste à ce moment-là, Mizuki revint dans la pièce, chargée d'un verre d'eau rempli à ras bord et d'une pastille bleue. J'avale ce dernier avec le liquide frais qui coule dans mon estomac, me procurant une sensation de bien-être. Je me sens mieux en dix minutes à peine.

-Ah, ça fait du bien de pouvoir parler à nouveau !

-Tu es guérie ? Fantastique ! Dit m'man, on peut aller dehors ? J'aimerais lui montrer mon poney !

-Bien sûr, ma chérie ! Mais fais attention tout de même ! Et ton père ne devrait pas tarder, sois à l'heure au dîner !


Mizuki approuve en souriant et me prend le bras. Je me rend soudain compte qu'elle ne regarde jamais ce qu'elle touche. Elle se contente de fixer un point au loin et de tâter les objets... Comme le ferait un aveugle, dans les vieux livres de la bibliothèque. Pourtant, je croyais que cette maladie était curable !
Je n'eus pas le temps de lui poser la question qu'elle m'emportait déjà en direction de l'extérieur. Pour une aveugle, elle se déplaçait drôlement bien ! Une fois en bas, elle ouvre la porte en grand et m'emmène vers un grand bâtiment de pierre, au milieu du plus grand jardin que j'avais jamais vu : dix fois plus grand que le jardin des Drolecoeur, et leur jardin, il est énorme ! Jetant un coup d'oeil en arrière, je reste bouche bée devant la taille de la villa. Absolument gigantesque ! J'en oublie que j'ai mal aux pieds...
Une fois dans l'imposante bâtisse, l'odeur des chevaux me prend à la gorge. Je n'est jamais aimé ces bestioles... Mais surtout leur odeur. Mizuki s'arrête enfin près d'un box plus petit que les autres. Dedans, un adorable poney brun à la bouille craquante m'observe d'un air curieux, genre « que fais-tu avec mon humaine ? ». J'ose lui caresser la tête, mais très, très timidement...

-Dis, Mizuki... Serais-tu... Euh... Aveugle ?

L'éternel sourire de la jeune fille disparait aussitôt, et elle flatte l'encolure de sa monture, évasive.

-Ça ne me rend pas différente de toi, Léna.

-Oui oui ! Bien sûr, je n'ai pas dit le contraire ! Je me disais juste que... Qu'il existe des traitements pour recouvrer la vue !

-On croirait entendre ma mère ! Mais moi, je refuse qu'on fasse quoi que se soit pour mes yeux. On pourrait parler d'autre chose, s'il te plait ?

-Oui, bien sûr...


Drôlement agressive ! Je n'aurais pas dut aborder le sujet, mais bon, moi et ma curiosité...
Un bruit retentissant s'élève à l'extérieur, suivit de quelques jurons. Mizuki bondit au dehors, son sourire réapparaissant miraculeusement sur ses lèvres. Devant la maison, un homme aux cheveux aussi noirs que Yumi venait d'arriver. Il avait trébuché sur un tas d'objets entreposés devant la maison. Mon hôte le désigna d'un doigt.

-Ça, c'est William, mon papa. Il à l'air un peu maladroit comme ça, mais je te jure que c'est le meilleur en bricolage !

Une silhouette que trop connue franchit tout à coup la grille d'entrée. Grand, la vingtaine, des yeux bruns et des cheveux noirs... Il s'approche de Mizuki en lui souriant gentiment :

-Bonjour, Mizuki, ça va aujour...

Il s'interrompt en se tournant vers moi. Me regardant de la tête aux pieds, il bafouille quelques mots incompréhensibles. Ma nouvelle amie prend les devant en m'annonçant d'une voix enjouée :

-Léna, je te présente Gustave, mon grand frère !















x Chapitre 2 - Un démon devenu ange

Devant une nouvelle pareille, je reste abasourdie, la bouche grande ouverte. Pour détendre l'atmosphère, Gustave me lance une blague idiote :

-Ferme la bouche, tu vas gober une mouche !

Je lui obéit en lui jetant un regard noir lourd de reproches. Il semble un peu intimidé. Mais je n'aime pas la lueur dans son regard... Je décide de faire un effort, car Mizuki à l'air d'énormément aimer son frère.
Pourquoi je me met à autant apprécier cette fille, moi ?! Je la connais à peine ! Je ne sais pas pourquoi, mais elle m'inspire confiance. Moi qui a toujours eu du mal à me faire des amis... Je vois alors William s'approcher de nous en souriant. Il me tend la main, et me sourit gentiment :

-Salut, petite ! Tu dois être la fille que Yumi et Mizuki ont trouvé sur un banc. Bienvenue chez nous !

Petite ?!
Je me demande comment ça se fait que des gens riches accueillent aussi chaleureusement une « clocharde » comme moi dans leur grande maison de rêve. Mais je suis contente qu'il ne me remette pas à la rue comme un vulgaire déchet que l'on jète à la poubelle...

-Bonjour, monsieur. C'est très gentil de votre part de m'avoir accueillie. Mais je pense reprendre la route, maintenant.

-Tu veux reprendre la route, aussi légèrement vêtue et à pieds nus ? T'en as du courage !


Prise au dépourvue, je baisse les yeux. Vous savez, dans les mangas, quand des mèches de cheveux passent devant les yeux et on dirait qu'il n'en ont pas ? Eh bien, je crois que je fais la même tête maintenant... Je n'arrive même pas à me souvenir de la raison pour laquel je marchais depuis si longtemps, et surtout à pieds nus... Fuyais-je quelque chose ? Avais-je survécu à un incendie ? Ou toute autre catastrophe ? Au fond de moi, je savais que je fuyais. Forcément. Mais quoi ? Ou qui ?...
William a du se rendre compte de ma tristesse, parce qu'il a proposé très gentiment :

-Tu peux rester aussi longtemps que tu veux près de nous, si tu veux ! Tu viens, Gustave ? J'ai du travail pour toi !

Les deux hommes s'éloignent, le plus jeune me lançant des regards à la fois inquiets et... indéchiffrables. Je me contente de le fixer dans les yeux d'un air méchant. Je ne peux pas m'en empêcher.
Un drôle de bruit retentit au moment où ils ferment la porte. Un bruit de sabots claquant sur du béton. Je me retourne en même temps que Mizuki, qui ne semble pas avoir de difficulté à répérer l'intrus malgré son handicap : un beau cheval bai, tout en finesse et en muscles. Les oreilles couchées en arrière, il arpente le jardin comme un perdu. Je me demande ce qu'il fait en liberté.

-Mizuki, il y a un cheval en liberté. Que fait-il dans le jardin ?

-C'est Akuma, un cheval que l'on a sauvé de l'abatoire. Il est impossible à approcher et a la sale manie de s'enfuir de son box pour se balader dans le jardin. Tu m'aides à le rattraper ?

-D'accord !


Les pieds de la belle jument laissent des marques profondes dans la neige, nous permettant de le retrouver derrière la grande bâtisse qui sert de maison à l'aveugle. Mais dès qu'il nous repère, il prit le galop. Des gerbes de neige me couvre des pieds à la tête, et Mizuki également.
Au bout de vingt minutes d'efforts intensifs, on parvient à coincer l'animal dans un coin du jardin. Vexée de s'être laissé prendre, Akuma nous toise d'un regard rempli de méchanceté, raclant le sol de son sabot noir. Et puis, un drôle de truc m'est arrivé.
Akuma s'est tournée vers moi ses beaux yeux noirs. Elle a humé l'air un instant, avant de dresser les oreilles et de m'observer un moment. Elle a ensuite fait un pas, puis deux, et a finalement soufflé dans une de mes mains. Mizuki, ressentant et entendant se qui se passe, semble subjuguée par cet évènement.

-J'y crois pas ! Akuma n'a jamais fais ça avec personne !

A la fois émue et effrayée, je me contente de fixer la jument, qui ne cesse de me couver de ses yeux si beaux, reniflant mes mains comme si elle cherchait quelque chose. Mais je n'ai rien sur moi qui pourrait lui plaire, pourtant...

-Dis, Mizuki, ça veut dire quoi, Akuma ?

La jeune blonde me sourit, et répondit doucement.

-Ça veut dire démon en japonais. On a sauvé Akuma de l'abatoire il y a un peu plus de deux mois. Mal en point, maigre comme tout, elle se montrait très vicieuse malgré sa faiblesse. Elle a du sentir qu'elle approchait du sang et de la mort, et se battait pour sauver sa peau. Ça a beaucoup touché ma mère, qui l'a ramenée à la maison. Mais malgré nos tentatives d'approche et nos soins, Akuma a toujours refusé d'accorder sa confiance à qui que ce soit. Tu es la première qu'elle approche. Et qui la caresse aussi facilement !

Je ne comprenais vraiment rien. Pourquoi moi ? Je n'aime pas les chevaux, je n'ai pas confiance, j'ai peur auprès d'eux. Pourquoi Akuma est-elle venue vers moi ?

-Tiens, met lui ce licol et emmène la dans son box.

J'obéis en tremblant et prend l'objet en question entre mes doigts. Nerveuse, je le passe machinalement sur la tête de la jument, qui se laisse faire. Akuma semble devenir un ange...

-Tu as réussi ? C'est formidable ! On va enfin pouvoir avancer avec elle, si tu t'en occupe !

-Oh là ! Tout doux ! J'ai de la peine, avec les chevaux moi !

-T'en fais pas, je t'apprendrai !

-Mais j'ai jamais dis que je restais !

-Tu ne veux pas rester avec nous ?


Mizuki avant prononcé ces mots d'une voix pleines de tristesse. Le coeur séré, je lui explique calmement :

- Je ne peux pas rester ici. Je dois continuer ma route, coûte que coûte et peut importe les obstacles que je devrais surmonter.

Ma nouvelle amie comprit alors à quel point je suis déterminée.

-Prends Akuma.

-Quoi ?!

-Prends Akuma. Elle ne sera jamais aussi heureuse ici qu'avec toi.

-Mais je ne sais pas m'occuper d'un cheval !

-Tu apprendras, Léna.

-Mais... Et tes parents ?

-Je leur expliquerai la situation. Et, tu sais, ils seront très heureux d'avoir trouver la bonne personne pour prendre soin d'Akuma. Maintenant, tu peux t'en aller.


Il y a des moments où j'oublie que Mizuki est aveugle. Mais à sa façon de se pencher pour ôter ses chaussures tout en fixant un point au loin me le rappelle vite fait. Elle me tend ses grosses bottes de neige et sa doudoune en insistant :

-Prend ça avec toi, tu en auras besoin.

Je lui sourit, même si elle ne peut pas le voir, et enfile les vêtements qu'elle me tend. Puis, elle m'aide à grimper sur le dos d'Akuma, qui, étonnament, ne broncha pas d'un poil.

-Au revoir, Léna. J'espère que tu trouveras ce que tu cherches.

-Merci Mizuki. Je ne t'oublierai jamais, et Akuma sera la pour me le rappeler.


Sur ces mots, Mizuki donne une tape sur les fesses de la jument, qui partit automatiquement au galop.















x Chapitre 3 - Une liberté si proche, et pourtant si lointaine...

C'est une sensation très étrange, la liberté. Moi qui pensait tomber du dos d'Akuma après deux foulées à peine, je tiens bon sur son corps musclé. J'ai même l'impression d'avoir fait ça toute ma vie. Elle galope fougeusement, en faisant attention de ne pas trop me secouer, heureuse d'être à nouveau libre.
Voilà que l'on sort dans la rue. Je jète un dernier regard dernier mois, pour apercevoir Mizuki qui nous observe sans nous voir, l'air à la fois heureuse pour nous et triste qu'on la quitte. Désolé, Mizuki, mais je ne peux pas rester auprès de toi. Pas après tout ça...
A la sortie de la ville, près d'un petit bois, je décide de tenter de calmer ma monture, qui ne semble pas prête de s'arrêter. Mais je n'ai absolument aucune idée de comment faire ça... Tentant le tout pour le tout, je me penche en avant pour attraper le licol rouge qu'arbore Akuma, et le tire légèrement en arrière. Réagissant au quart de tour, celle-ci freine automatiquement. Surprise, je glisse en avant pour finir le nez dans la poussière... Ou plutôt dans la neige ! Raah ! Je jure de ne plus jamais monter sur cette bestiole ! Qu'est-ce qui m'a prit d'écouter une fille que je connais que depuis quelques heures et de prendre un démon avec moi ?! Je ferais mieux de la ramener !
Alors que je prend le licol entre mes mains pour ramener la jument à son propriétaire, la lueur que je vis dans ses yeux m'a frappé en plein coeur : elle voulait être libre. Elle aussi voulait continuer sa route, sans savoir ou même sans vouloir savoir où elle va. Au fond d'elle, je pense qu'elle ressent la même chose que moi : l'envie de continuer sa route, sans but précis mais en toute liberté. Car moi, je veux être libre...
Des souvenirs me poignardent soudain en plein coeur comme un couteau.

Il fait noir, si noir... J'ai peur, j'ai mal... Des cordes me scient les poignets et les jambes. Un baillon me déchire la bouche... Une musique passe en boucle, une musique de R&B. Des voix retentissent derrière la porte d'où s'échappe une raie de lumière... Des inconnus semblent se disputer. J'ai froid...
Les cordes glissent tout à coup silencieusement, et une minuscule silhouette s'éloigne en couinant. Sauvée par un rat... Je me lève précipitamment, terrifiée. Les évènements se brouillent dans mon cerveau... Malgré la noirceur de la pièce, j'aperçois une table où est posé mon cher Ipod, cadeau de mes parents... Mais qui sont mes parents, au juste ?
Je l'empoche rapidement et tourne en rond autour de la pièce sans un bruit. J'ai du mal à retenir mes sanglots, et des larmes rendent ma vue floue. Soudain, la porte s'ouvre. Je me cache derrière, attendant que les hommes entrent... Une fois fais, je prend mon courage à deux mains. Je franchis la porte, et je cours, je cours... Sans m'arrêter. Jusqu'à parvenir dans une petite ville qui à l'air tranquille.

Sonnée par ces évènements, je m'effondre dans la neige, la tête entre les mains. Alors, c'est ça que je fuyais ? C'est pour ça que j'ai voulu m'en aller de chez Mizuki, qui m'a accueilli avec tant de gentillesse ? Qui m'a donné une jument ?...
Je n'entends pas tout de suite Akuma, qui commence à s'énerver derrière moi. Dansant sur place, elle hume l'air de ses naseaux dilatés au maximum. Quelque chose approche, quelque chose de dangereux, elle le sent.

-Elle est là !

Je lève la tête à la vitesse de l'éclair pour voir un homme courir dans ma direction. Il n'a pas l'air de me vouloir du bien.. Un deuxième arrive à ma gauche, et un troisième à ma droite. Un choix s'offre à moi : me jeter dans la gueule du loup, ou risquer de me tuer en chevauchant Akuma ? Sans hésiter, je choisis la deuxième option. Je préfère mourir que retourner dans le noir !
Le démon semble comprendre mon intention, car elle se tient tranquille lorsque j'essaye de monter. Mais rien à faire, elle est trop grande !

-Eh, elle essai de s'enfuir !

-Faudrait déjà qu'elle arrive à monter !

-Ferme-là et attrape-la au lieu de dire des blagues pas drôles !


Je pense qu'Akuma a compris l'urgence de la situation, parce qu'elle a plié les genoux et s'est couchée sur le sol pour me permettre de monter plus facilement. Je suis sûr que cette jument est allée en haute école ! Sans hésiter une seconde de plus, je passe ma jambe par-dessus son dos et m'installe de façon aussi équilibrée que possible. Aussitôt, Akuma se lève, un peu brutalement j'avoue, avant de bondir au triple galop.

-Prenez les voitures ou on va la perdre !

Encore une fois, je me sens tellement libre sur le dos de la jument. Encore une fois, j'ai l'impression d'avoir fait ça toute ma vie. Mais passons. Akuma semble aussi déterminée que moi de fuir la captivité et l'obscurité. Et ça me motive encore plus.
Et puis, le drame. Un 4x4 surgit de nulle part devant nous, roulant à toute vitesse dans notre direction. Akuma n'a pas le temps de freiner. Boom.